Enfants d'Espagne

Enfants d'Espagne

30.3.14

PIC ET PIC ET RAS LA CHINE


Le pic de pollution (mi mars) a valu aux parisiens 3 jours + 1 de gratuité dans le métro (week-end + lundi pour qui aura saisi les annonces). Dès la reprise ("ça va comme un mardi !"), la pollution est retournée en vacance, l'actualité s'est branchée sur un autre sujet ("il faut être vif coco sinon les gens s'ennuient !") et les contrôleurs sont revenus dans le métro : "crack dedans ! ha ! ha ! les transports gratuits et puis quoi encore !".

Une dizaine de jours plus tard re-pic de pollution, mais cette fois-ci les particules fines font place à la visite officielle du nouveau grand ami de la France, Xi Jinping, promoteur du  zhongguo meng (le rêve chinois remplaçant officiel de l'American dream). La pollution a beau faire des efforts, elle a bien peu d'atouts face au sauvetage de la Famille Peugeot par le pays du milieu. "Pour des raisons de sécurité", on ferme même quelques lignes de métro, on éloigne les Gaspards souterrains, pas question d'indisposer la supermanne du plus malin des pays capitalistes. Les fantômes se serrent la pince, Moi président rencontre Mao président et c'est la fête à Versailles. Sur les lignes ouvertes, les contrôles vont bon train. Ainsi cette femme, sans doute toujours dans l'ambiance des transports gratuits les jours de pic, apercevant un groupe de contrôleurs planqués au détour d'un couloir (ils adorent le cache cache) assistés de policiers en civil (reconnaissables à leur brassards oranges marqués Police) tente de repartir dans l'autre sens en remontant les marches ; elle est repérée : "Madame, ça ne sert à rien, on va aller vous chercher". Elle s'arrête, panique, avance, revient sur ses pas. "On ne va pas le redire !" Elle obtempère. Contrôle des papiers, soudain tutoiement, amende ! Les contrôleurs et leurs amis policiers sont joyeux, ils s'amusent beaucoup à verbaliser en ces périodes  de PM10 pénétrantes. Tiens ce même jour, Amnesty International publie son rapport sur la peine de mort : le gouvernement chinois très largement en tête avec ses exécutions par milliers. Ça doit être bon pour les startups ! Bah, on ne peut pas tout avoir : les droits de l'homme, les particules fines et les fines parties capitalistes. Mais tout de même, on aimerait bien qu'un sérieux vent se lève pour emporter loin, hors des limites de la stratosphère, les nanoparticules et leurs défenses policières. Mais ce coup de vent, il ne se lèvera pas en ce jour d'élections.

28.3.14

EVAN PARKER À LA GRANDE BOUTIQUE
RETROUVAILLES AVEC PATRICK MOLARD

Le 9 mars en Bretagne, les bourgeons ont décidé d'éclater. Pour accompagner l'œuvre du temps, Evan Parker est l'invité de la Grande Boutique à Langonnet. Dans la pénombre de la tintante salle du premier étage pénétrée de petites îles brillantes, en trois parties, il offre un solo transcendant. Le regard et le corps abritent une forme de réalisme dessinant des ombres longues. Les enchaînements de langage émaillé de reflets invitent à la mémoire profonde, s'éparpiller pour se construire avant que les parcelles ne se rassemblent. Appel à la poésie, à la beauté et à la liberté, un solo d'Evan Parker est toujours le fil conducteur vers l'arrivée de l'aube.

Le sonneur de cornemuse Patrick Molard a déjà rencontré Evan Parker l'été dernier un peu plus à l'ouest, à L'allée couverte de Lesconil (6000 ans avant John Coltrane) de Poullan-sur-mer, lors du festival Livioù. Il est ce mois-ci à la Grande Boutique pour une série d'activités. Naturellement, il se joint à Evan Parker. Dès la première note, l'accord est idéal, évident, déterminé comme une preuve printanière surgissant de l'intégrité de l'être. En vastes cycles, les thèmes se forment par la puissance magique du jeu commun, un sorte de gratitude du lieu de naissance de l'art humain au milieu des oiseaux.

Evan Parker, continuera à répondre à ces appels de Bretagne, le 22 mars au Musée des Beaux Arts de Nantes et le 19 juillet à St Marc sur la célèbre plage de Monsieur Hulot (Farniente Festival)

Photo : B. Zon

27.3.14

HYMN FOR HER PREMIÈRE


1er avril
Première de Hymn for Her en France
Première partie d'Otis Taylor

et le 26 mai
Premier album européen du duo (sur Wan+Wan)

mémo
Premier article à propos d'Hymn for her sur Le glob

26.3.14

ELECTIONS : LA PREUVE PAR DEUX


Photo : B. Zon

LUMIÈRE AU BOUT DU TUYAU

L'arroseur arrosé, des frères Louis et Auguste Lumière, premier film de fiction (1896), reste d'une saisissante actualité.

21.3.14

ANNONCE DU PRINTEMPS
PAR BERNARDO LE CORMORAN

À Paris, le printemps a été annoncé par Bernardo le Cormoran en personne,
pour l'occasion perché en haut d'un des arbres les plus élevés de la ville.
Photo : B. Zon

15.3.14

BLUES POUR PASCAL RIEHL

 Pascal Riehl, sacré disquaire aux conseils lumineux pour la musique classique et pour le blues, a été emporté soudainement à 47 ans. Ce devrait être impossible ! Une pensée forte pour ces moments de passion et de rigolade, rue de Rennes, avec Isabelle et Olivier autres messagers qui font sérieusement avancer la musique loin des flonflons mondains, une autre bien sûr pour son petit Léo, Thomas et Séverine dont il parlait toujours avec affection, et un grand merci aussi pour son aide précieuse et les découvertes qu'il a permises.

Photo Familiale

3.3.14

ILL CHEMISTRY AU ROCHOIS
PAR CATTANEO
(EN REVENANT DE NANTES)


Au cours de la manifestation nantaise du 22 février contre le projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes, les violences de la police ont occasionné de nombreux blessés parmi les manifestants, parmi les journalistes, parmi les passants ; deux ont été gravement atteints. Il paraît qu’en face aussi on déplore des victimes, sans qu’on sache trop bien ce qui a pu leur arriver : les flics, on ne sait pas comment ils se blessent, ils se coincent les doigts dans la culasse de leur flingue, ou un truc comme ça, on ne sait pas. En tout cas, l’ambiance de rue a été véritablement explosive ce samedi, je peux vous le garantir, et au lendemain de cette mobilisation qui vit une foule d' opposants vivre des moments héroïques, les rappeurs de Minneapolis Carnage et Desdamona sont venus manger une tarti fuckin’flette et boire un coup à la maison avec Bénou, Pablo, Merlin, Jean et Christelle. Le duo jouait le soir-même chez Hélène, au café « Le Rochois » de si excellente réputation, le bistrot favori de plusieurs générations de joyeux camarades. Carnage a causé tout l’après-midi avec Des, un flot incessant de conversation qui jaillissait trop vite pour que j’en saisisse autre chose que des bribes (un mot toutes les trois minutes environ) ; dès lors, je me suis laissé porter par le courant et, après avoir doucettement dérivé du Ruicard au port en passant par les Garennes, l'heure fut venue de nous retrouver place du Bouffay pour procéder aux réglages.
Les gens arrivaient. Les instruments et les amis aussi, les couleurs, les pinceaux. On parle, on sourit.  On lève le coude en discutant de la ZAD et de l’Amérique, on célèbre l'amitié. Des copains perdus de vue refont surface, depuis tant d’années, ça s’arrose. Il y a vraiment du monde, ce soir… Et puis on se rend compte que le brouhaha cesse, le concert a commencé, feutré, la salle fait silence, imperceptiblement plusieurs dizaines de consciences entrent en connexion.
Feutré, disais-je, suave même. Tranquille. Du hip hop éthéré, avec une base minimaliste et un chœur soul. Sans mot. Pour mieux captiver l’auditoire et l’inviter à danser, le duo a choisi de créer une délicate tension entre l’émotion fragile qui saisit l’esprit et la très douce implication du corps qui ne s’appuie pas encore sur un rythme trop appuyé mais bouge, dans la pénombre et la douce prémonition de ce qui va arriver. Et cela vient, vite, dès la deuxième chanson, et le flow, et le son et les messages. On peut choisir sa vie. Et la danse donc. On tourbillonne dans certaines sphères d’où jaillissent des vibrations positives. Il fait chaud, c’est la fin du premier set, on ne l’a pas vu venir. Oh, et puis voilà que ça recommence, à peine le temps de siffler un verre et de s’en faire resservir un autre en discutant le coup avec un collègue, qu’on est rendu à vouloir le poser de toute urgence pour gigoter et taper dans ses mains, chanter. Même si on ne voit pas tout, on entend bien, on navigue, on comprend où ils veulent nous emmener avec « Save my people », le débit irrésistible de Carnage est comme du feu sacré que vient apaiser la tendresse groovy de Desdamona. On s’agglomère, on respire ensemble le même air. J’en vois qui sont en transe, qui ondulent du ventre les yeux fermés, ou font des chorégraphies belles et compliquées avec leurs pieds, qui utilisent leurs bras, ou leur cou, leur jambes… J’en soupçonne même un de jouer avec une partie de son anatomie que la décence m’empêche de nommer, ce salopiau se reconnaîtra.
Hey ! Ils nous invitent  à les rejoindre : Tim Le Net se saisit de l’accordéon, Yann Le Bozec de la contrebasse et moi d’un tube de peinture, et hop ! Faut que ça gicle ! Et après ça, Martin Chapron à la guitare électrique, allez hop, hop ! Et vas-y que ça t'improvise des trucs pas possibles ! Le public  applaudit à tout rompre, c’est généreux et cool, les américains sont incandescents, La Roche Bernard en ébullition ; merde, je comprends un truc : le réchauffement climatique, en fait, c’est nous ! Et ils continuent avec « The source », distillant un Love is the reason so love your life qui enthousiasme la foule, l'enflamme, positive vibration, je vous dis ! Personne ne veut qu’ils partent, les gens crient continuez, continuez ! Le bonheur rayonne quand ils démarrent une version rap de "Billie Jean", torrides, les corps dégoulinent, les veines sont parcourues d’étincelles qui crépitent, dehors dans la nuit des milliers d’étoiles scintillent par la grâce d’une éjaculation divine.
Si j’en fais trop, dites-le.
N’empêche, quand j’affirme que La Roche Bernard est le village le plus cool du monde, les gens pensent que j’exagère : ils ont tort. Nombreux sont les échos qui me donnent raison : Timothée Le Net explique souvent en préambule de ses concerts qu’il est originaire de « la perle du Sud Morbihan », Desdamona s’exclame sur internet « I love La Roche Bernard ! », quant à Carnage The Executioner, il m’a confié sur le rocher, adossé au canon qui domine la Vilaine : « It’s my favourite place » ; alors ?
Alors, la bonne question à se poser n’est pas « y a-t-il une vie après la mort ? », mais plutôt « y a-t-il une vie avant ? ».
Et la réponse, évidente, je vous le dis en vérité brillait de mille feux ce soir-là chez Hélène, notre poule rousse chatoyante, comme elle brille aussi à Notre-Dame-des-Landes.
Cela fait déjà deux raisons de ne pas désespérer.

Stéphane Cattaneo

" Love is the light"
 "Love is the reason"
 "Love is the source"
 "Love at first write"

Un grand merci à Timothée Le Net et Hélène Potabes, à Bénou, Stéphane, THX et tous les amis du Rochois, de la Roche Bernard et des environs qui ont permis ce beau moment. 


Photo : B. Zon, peintures Stéphane Cattaneo d'après "The source" de Desdamona et peinture en direct au Rochois le 23 février sur "Love at first" de Desdamona, Carnage The Executioner - arr. Paul Marino.

2.3.14

ILL CHEMISTRY À LA GRANDE BOUTIQUE
PHOTOGRAPHIÉ PAR ÉRIC LEGRET

Sur la porte de la cuisine de La Grande Boutique, antimusée de musique et de vitalités à Langonnet (Bretagne), est agrafée une photographie de Léo Ferré, témoignage d'une sorte d'accomplissement poétique d'une voix qui a interrogé, commenté, dérangé et armé d'éloquence son époque. L'instantané souligne une sorte d'intimité solidaire, d'ombre combative. L'image est signée Eric Legret, un œil de Bretagne qui capte les reflets du bien-fondé. Sa photographie n'est pas du côté du miroir aux alouettes, elle aide en un franc compagnonnage à emboîter le pas des éclairs.

Eric Legret aime la musique, transcrire ses dispositions, son besoin d'autrui. Pas surprenant donc de le retrouver fréquemment à La Grande Boutique de Langonnet, lieu de voix fermes. Le 22 février, il y était donc pour retouver le pigmenté et bluesy hip hop de Krismenn au trémie généreux (qui rappe en breton - et ça n'a rien d'anecdotique) et Ill Chemistry déjà photographié au festival Livioù en Août 2013. À Livioù, d'ailleurs, Desdamona et Carnage avaient aussi rencontré Hélène Labarrière envers qui le message fut direct : "We love you". Alors, rien de plus naturel non plus que d'inviter cette belle habituée de la Grande Boutique sur deux morceaux. Laissons-nous cette fois, tenter par les images d'Eric Legret, des images de musiciens en pleine forme.

Un grand merci à Bertrand Dupont, Perrine Lagrue, Manon Fouquet, Nolwenn Blouin et Corinne Stéphan et ses élèves aux questions perspicaces qu'il a aussi fait bon retrouver.

Site d'Eric Legret

PALME DE LA DÉCLARATION PORNOGRAPHIQUE

"Je pense que si on veut avoir davantage d’étudiants [qui lancent des entreprises], si on veut avoir une vraie équipe France, c’est la culture [de l'entrepreneuriat] qu’il faut changer et il faut commencer très tôt, il faut même commencer dès l’école maternelle."

Geneviève Fioraso, ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche (5 février 2014 in Les Échos)