Enfants d'Espagne

Enfants d'Espagne

25.5.13

L'HISTOIRE RACONTÉE PAR LES BUSINESSMEN DE LA RUE DE SOLFÉRINO

Les descendants de la SFIO ont décidément une bien piètre idée de l'histoire - sans doute sont-ils plus occupés à vanter les mérites de "l'entreprenariat" (bientôt obligatoire à l'école dite laïque) et de la "compétitivité". Harlem Désir, directeur du Parti Solférino, trouvait, invité de Mots Croisés sur France 2 le 21 janvier 2013, que les réfugiés espagnols avaient reçu un chouette accueil dans ce que le gouvernement français de l'époque (Daladier) appelait lui-même "camps de concentration" (5000 y moururent l'année de leur arrivée en 1939 - 900 inauguraient, par les bons soins du tout frais gouvernement Pétain le 20 août 1940, un premier convoi pour Mauthausen bientôt suivi par 12 000 autres) : "Vous savez, des Espagnols ou autres qui ont été accueillis en France au moment où leur pays traversait des drames et des guerres, et qui en même temps étaient fiers de la solidarité de la France, qui étaient soulagés, qui étaient reconnaissants". C'est au tour de Claude Bartolone, président de l'Assemblée Nationale de faire une dédicace sans inspiration, gavée d'ignorance, lors de sa visite à Oradour sur Glane le 15 mars dernier : "Puisse aucun Auradour se reproduire jamais".... (sic, sic et resic... et même sick !). Il est des moments où le respect de l'orthographe des noms propres est plus qu'une politesse, plus qu'une coquetterie, plus qu'une banalité de bête campagne électorale adressée dans les ruines d'un village martyr.

16.5.13

COURTNEY YASMINEH
ET TERRAIN D'ENTENTE

Campus-Terrain d'Entente est un endroit de cohérence où se déploie le visage véritable de ce qui rend possible la musique. Situé au 12 Rue Froment dans le 11ème arrondissement parisien, ce lieu (résistant) de répétition des grands soirs porte parfaitement son nom (en trois mots signifiants) de géographie, d'écoute et d'entraide. C'est là qu'en janvier 2003 naissait le groupe Ursus Minor affûtant avec ses invités (Ada Dyer, Jeff Beck, Dead Prez, Boots Riley, D' de Kabal, Spike) ce qui allait se forger quelques jours plus tard sur la scène de Sons d'Hiver puis dans leur premier album "Zugzwang". C'est aussi Campus- Terrain d'Entente, dix ans et quelques jours plus tard qu'a choisi la chanteuse de Minneapolis Courtney Yasmineh pour une intime mais déterminée première parisienne le 25 mars dernier. Dans la salle, on reconnaît le cinéaste Jean-Pierre Sinapi, l'illustratrice Sylvie Fontaine, la chanteuse Emilie Lesbros, le guitariste Jean-François Pauvros, la graphiste Marianne Trintzius, la bande d'Ursus Minor, ce jour là justement en pause de sa tournée printanière (Tony Hymas, François Courneloup, Grego Simmons, Desdamona et Ada Dyer toute émue de se retrouver dans ce studio 10 ans après)...

L'orchestre est composé de Kale Baglyos Reed (guitare et violon), Casey Smith (basse) et Rob Genadek (batterie). Rob est aussi le directeur musical de l'ensemble (et incidemment ingénieur émérite voisin de notre ami Steve Wiese au studio Creation Audio de Minneapolis). La cohésion de l'orchestre frappe immédiatement, le son est impeccable. Courtney Yasmineh et ses garçons offrent une trajectoire qui depuis son fieffé rock laisse apparaître de fines strates de couleur formant une étonnante image d'un rêve de soi se faufilant dans les arcanes du réel. "Ballad of my other self", "Heartbreak woman" "Bury me" ou "Wake me when it's over" (1) sont autant d'encoignures aux caractères particuliers, de terrains d'entente aux aspirations conscientes préoccupées du passage du temps.

(1) Titre du prochain album de Courtney Yasmineh à paraître sur Stupid Bitch Records

Remerciements chaleureux à Thierry et toute l'équipe de Campus-Terrain d'Entente 
 
Emilie Lesbros, Courtney Yasmineh, Desdamona, Ada Dyer

Photos : Z. Ulma

2.5.13

SPIROU ET SES DOUBLES
BON ANNIVERSAIRE !

Spirou, le petit groom, est né à l'instigation de l'éditeur Jean Dupuis en 1938 sous le trait du dessinateur français Rovert Velter dit Rob Vel qui a été l'assistant de Martin Branner créateur de Winnie Winkle (Bicot). Juin 1939 c'est le mois des accords Paris-Londres, des leurres Moscou-Londres, le mois de la dernière exécution publique en France, celui des pactes entre l'Allemagne nazie et la Lituanie, l’Estonie, la Lettonie, de l'intégration de la Slovaquie au maudit Reich, le mois où l'on essaie de détourner l'attention de l'inévitable avec les coups de poing de Marcel Cerdan ou les traits impudents de Sacha Guitry, celui de la naissance de Brigitte Fontaine, mais aussi celui où Rob Vel offre un petit compagnon à Spirou, l'écureuil Spip (1) (amusant puisque Spirou veut dire "écureuil" en Wallon). Spip, heureusement souvent de méchante humeur, sera sous les pinceaux d'autres dessinateurs, un des grand incompris du XXème siècle, il a saisi la misère humaine. On aurait dû l'écouter davantage. En 1944, Jijé reprend Spirou, lui colle un copain, Fantasio (imaginé par Jean Doisy), zazou gaffeur qui se prend très au sérieux, mais n'a pas un mauvais fond. En 1946, Jijé qui a plus d'un Don Bosco à fouetter met Spirou dans les mains du jeune Franquin. Si cette adoption ne consacrera jamais la paternité de Franquin, c'est bien avec ce papa-là - phénix de la bande dessinée - que Spirou prendra pleine vie avec un nombre de compagnons ou interlocuteurs souvent splendides (le Marsupilami bien sûr, mais aussi Sécotine, le Comte de Champignac, Dupilon, Zorglub, le Maire de Champignac, Zantafio...).

En 1969, c'est la tragédie, Franquin abandonne Spirou et c'est le Breton Fournier qui le recueille. Inconsolable de la séparation avec le Marsupilami, Spirou se venge tendrement en se politisant (son ex papa fait curieusement parallèlement de même avec un Gaston de plus en plus rétif à toute autorité, ennemi de la police, de la rentabilité, de la croissance, de la bêtise humaine et des parcmètres, ami de la musique et des animaux). Spirou devient par exemple farouchement anti-nucléaire - ce sont les années Plogoff. Mais la décroissance n'est pas du goût de l'éditeur et Fournier est débarqué pour être remplacé par une bien médiocre équipe Nic Broca et Raoul Cauvin (scénariste à tout faire avec plus ou moins de bonheur). Des oncles sans compréhension. On ne pouvait imaginer pire. Il faut sauver le groom riant, Yves Chaland s'y adonne brièvement, à l'ancienne comme une séquelle de Jijé , mais c'est le tandem Tome et Janry qui hérite avec brio de la garde d'un Spirou plus adulte qui se colle à un monde en perdition (racisme, fin des illusions, Mafia) alors que Sécotine se décolle de son surnom pas sympa pour reprendre son prénom de Sophie. Spirou découvre son sexe et n'ignore plus la mort. La machine qui rêve bascule dans une autre dimension. Spirou, désormais une affaire de duo, est repris en main par Morvan et Munuera puis Yoann et Vehlmann. Chacun apporte ses lumières, mais secrètement on regrette toujours Franquin capable de faire sursauter la Terre sans en avoir l'air. Soudain tout le monde semble avoir le droit de dessiner Spirou : Frank Le Gall s'y jette (Spirou manque de peu de se confronter à la Commune), puis Yann et Tarrin, Émile Bravo lui invente brillamment une jeunesse plus probante que celle conçue par son vrai père, Yann et Olivier Schwartz emboîtent le pas avec moins de poésie, mais beaucoup de fantaisie, une pluie de références et une clarification sur l'attitude du petit héros pendant l'occupation, Lewis Trondheim et Fabrice Parme tombent à l'eau dans Panique en Atlantique, Frank Pé (auteur de Broussaille) travaille à un nouvel album (attendu avec impatience).

Le 18 avril dernier, à Douarnenez, dans la grande salle de l'Hôtel de France, juste avant le concert de Tony Hymas, Hélène Labarrière et Jacky Molard, prélude au Livioù festival (2), Cattaneo (3) nous rejoint avec comme signe distinctif le numéro 3914 du Journal de Spirou qui fête les 75 ans du groom. Stéphane arbore avec joie son magazine. Alors que dans la salle la musique se prépare avec sérénité, dans le journal c'est la folie, tout le monde dessine Spirou : Feroumont, Thiriet, Libon, Berth, Dany, Vink, Bertail, Renaud Collin, Darasse, Madaule, Jannin, Bédu, Bercovici, Dairin, Bruno Duhamel, Bertschy, Bannister, Pic, Jacques Louis, Laudec, Clarke, Étienne Lécroart, Krassinsky, Rudy Spiessert, Bouzard, Tebo, Nob, Man Arenas, André Juillard, Hugo Piette, Sti & Cromheecke, Fred Neihardt, Bianco, Alfred, Laurent Bazart, Dino. Spirou fait même une apparition dans l'excellente série Esteban de Matthieu Bonhomme. Tous les anciens (sauf Jijé, Rob Vel et Franquin bien sûr - on n'en est tout de même pas là) reprennent du service le temps d'une histoire courte (comme celle si tendre de Frank Legall où Spirou retrouve Franquin), d'une planche ou d'un strip.

Tiens on aurait bien aimé, tant qu'à faire, y voir un Spirou dessiné par Cattaneo, un autre par Daniel Cacouault (également présent à Douarnenez puisque Livioù lui a confié l'affiche), ou encore par Sylvie Fontaine, Laurel, Juanjo Guarnido, Johan de Moor, Efix, Pierre Cornuel, Stéphane Levallois, Zou, Boucq, Chloé Cruchaudet (4) ... On s'arrête au moment de fantasmer sur ce qu'aurait été un Spirou envisagé par Moebius.

La multiplication des Spirou se révèle un miracle plus probant que celle des pains. Elle raffole des travestissements les plus vraisemblables. Pourtant même sous les coups de mille pinceaux, le petit groom garde une sorte de clarté mystérieuse bien à lui, une empreinte alimentée dotée d'un cœur habile. Quel drôle de secret, cette manière d'atteindre à 75 ans cette forme de présence indispensable sans menace, qui se permet tous les insolites, même ceux des mises en musique de Tony Hymas, Steve Beresford et John Zorn dans Bandes Originales du Journal de Spirou (5) (1989).

Spirou est un orphelin aguerri, il sait embarquer tous ceux qui y touchent pour dépasser le cadre de l'exactitude et aller dans les champs de l'intangible et de l'épreuve. Sacré costaud ! Bon anniversaire camarade groom.


(1) Le jour où le écureuils perdent la boule sur le Glob
(2) Tony Hymas, Hélène Labarrière et Jacky Molard à Douarnenez, prélude au Livioù festival sur le Glob
(3) Cattaneo artisan nato
(4) D'autres dessinateurs mentionnés dans cet article figurent également sur la page artisan du site nato
(5) Bandes Originales du Journal de Spirou sur le site nato

1.5.13

1er MAI 2013 À PARIS

Bon ! Cela fait des années que l'on chante "... où alors ça va péter !" Il ne faudrait pas que ces promesses soient aussi de type "électoral".

15heures Place de la Bastille
12h30 Place des fêtes («La chanson est dans le quotidien de chacun ; c'est sa fonction, sa force. Sociale, satirique, révolutionnaire, anarchiste, gaie, nostalgique... Elle ramène chacun de nous à son histoire.» Barbara)
13h30 rue de Belleville (magnifique version du Temps des Cerises !)
18h Rue du Faubourg St Antoine («Il faut être l'homme de la pluie et l'enfant du beau temps.» René Char)

 Photos : B. Zon