Enfants d'Espagne

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6.2.13

ANOTHER KIND OF WHITE // FRAME #1
PAR GUILLAUME SÉGURON


Another Kind of White // Frame#1


J’ai depuis plusieurs jours un cadre blanc sous les yeux.
Je le vois, posé là, devant moi, sur un tabouret à côté de la fenêtre.

Comme un miroir translucide mon regard traverse son opacité et cherche dans sa perspective vide ce que je pourrai bien y voir.
Il guide mes yeux lorsque, comme ce matin, je travaille la mécanique des doigts.

Il n’est pas vraiment blanc, un peu jaune par endroit.
Un vieux blanc qui se souvient.
Le souvenir de la sève.
Malgré les couches, la résurgence de cette nature profonde.
Cette essence qui nous oblige à une mémoire de la nature.

Difficile d’oublier que l’on a été un arbre, une foret.
La jungle.
Et qu’avec elle nous parvenait d’éternelles promesses de vie.

Je ne sais quant il prendra pleinement sa fonction de cadre.
Que peut devenir un cadre lorsque tout ce qui passe, se passe est hors-champ ?
Hors du cadre ?
En dehors du cadre.
L’extérieur qui s’invite et prend pleinement sa place.
En dehors de certains cadres.
Même ceux imposés par la vie elle-même.
La vie est-elle un cadre ?
Que cadre-t-elle ?

Il est là.
Toujours.

J’aime bien qu’il soit vide.
Est-ce que les peintures blanches de Robert Ryman sont vides ?
Est-ce que la mémoire est blanche ?
Est-ce que le silence est blanc ?
Qu’est-ce qu’un son blanc ?
Peut-on être pur et ne pas être blanc ?
Qui n’est pas blanc ?
Est-ce que le blanc est pur ?
Qui est l’impur ?
Peut-on être impur et blanc ?

Mécanique des doigts.
Mécanique de la pensée contre le blanc de l’esprit.
L’esprit est-il blanc ?

J’aime ces objets sans fonction qui me regardent de leurs grands yeux étonnés de mon ignorance.
Souvenir de Marcel D, de Francis P, amis d’Erik S ?
Ce cadre n’est pourtant pas un Ready-made, je préfère les totems.
Ces autres souvenirs des arbres.

Je ne sais pas ce qu’il va finir par encadré, mais le moment venu mon choix sera le sien.
Il invitera celle ou celui qu’il voudra ou pas
Indépendamment de moi.

Puis
Avant d’en savoir plus sur une autre sorte de blanc, avec le piano de Tony H encore en mémoire, je pense à White on White de Gyorgy Ligeti.


Prés-texte // Mardi 29 janvier 15:27

Une autre nouvelle vient de l’autre rive.

Blanche et silencieuse comme une feuille vide de sens et qui cherche son orientation.
Comme une inspiration sans objet.
Sans prise.
Mise entre parenthèse du présent.
En attente, à distance.

Une autre nouvelle – lente comme une lame de fond – qui trouble le souvenir que j’ai d’une belle nuit, d’une belle soirée,  d’une certaine rencontre attendue.
Qui l’oblitère comme un rappel à l’ordre ne retenant pas l’écho de mes paroles te disant :
On s’est fini avec Pierre V, à 4 du mat en s’écoutant News From the Jungle.

Mon point de vue peut maintenant bien attendre un jour de plus, une ligne de plus.

Dans mes « nouvelles réponses des archives » j’empruntai ces lignes écrites un 4 septembre : Notre pensée à tous va à ceux qui, là-haut, montent la garde… (el nostre pensament va als que, allà dalt, fan guàrdia...)

Veillons.
Montons la garde.
Par chance mon cadre est toujours là, dans le blanc de ma nuit.
Veillons dans le blanc de la nuit.

À Jean, à Tony, à François… mes pensées sont d’abord pour vous Petite Ours.


Guillaume Séguron
Sundance Kid Studio
6 février 2013
 Photo (Ajmi le 26 janvier) : Dominique Héraud

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